J'aime écouter les gens raconter leur vie, leurs souvenirs, à la fin des repas. Le gros des invités est parti, on se raconte des anecdotes.
Oui, la plupart on les connait, mais on ne raconte pas pour informer, on raconte pour se rappeler, pour ne pas oublier, et surtout pour rire. On vient de fêter un anniversaire, on veut s'emmitoufler dans la nostalgie des années passées, inoubliables, mais irrécupérables. On a bu un peu trop de vin, on parle trop fort, on sait qu'on dérange les voisins. Mais que diable! c'est notre anniversaire, on peut bien les déranger une fois dans l'année!
Quand on était petit, ces conversations qu'avaient les adultes, on les trouvait interminables, assommantes, et l'ennui, la fatigue, nous prenait irrésistiblement... En grandissant, on s'est dit que, quand même, on aimerait bien avoir autant de choses drôles à raconter entre amis plus tard, et on s'est mis à écouter, à rire avec. On est devenu le public rêvé des plus vieux qui racontent: ceux à qui on n'a pas encore raconté! On est devenu bon public. On s'attarde plus longtemps en fin de soirée, on écoute en souriant. On commence même à connaître suffisamment bien les anecdotes pour les connaître et anticiper les rires. On rit parce qu'on connait.
On se dit que, tout de même, tout ne peut pas être parfaitement vrai, il enjolive certainement. Pourtant, personne n'a l'air de remarquer ce manque de véracité, personne ne lui dit qu'il exagère, et personne ne lui rappelle comment ça s'est passé pour de vrai. Alors, on hausse les épaules, on sourit un peu plus, et on y croit.
On s'imagine, surtout, à leur âge, en espérant avoir d'aussi bons amis. On fait mentalement le tour de ses propres amis, de ses propres souvenirs, et on se demande si on aura quelque chose à raconter de notre vie actuelle dans toutes ces années qui fasse autant rire les vieux et les moins vieux copains, qui nous fasse nous bidonner avec autant de mélancolie des jours passés.
On espère, surtout,que le passé nous fera rire, parce que le futur nous angoisse un peu.
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