jeudi 21 janvier 2010

Lire dans le métro

J'aime cette bulle que l'on crée lorsqu'on ouvre un livre dans les transports en commun...
Un livre d'amour et vous boirez les pages avec passion, et tout couple que vous apercevez vous fait sourire ou vous rend dingue de jalousie (si si, mais vous ne vous vous l'avouez pas (trop de vous!)). Si c'est un bon polar, ou un livre à suspense, vous avalerez les pages avidement, vous voudrez absolument savoir ce qu'il va se passer, la suite, la suite! Vous trouverez tout à coup que les 40 minutes de trajet habituelles sont étonnement courtes, ça n'est pas possible, le métro allait plus vite aujourd'hui! Lisez un livre philosophique (qui vous plait, ne vous forcez pas!) et vous n'arriverez pas à lire vraiment. La lecture de 5 ou 10 lignes vous imposera une pause "réflexion", parce qu'il faut être sûr de comprendre, il faut pouvoir mettre en application à ce qui nous entoure, il faut pouvoir critiquer et créer notre propre théorie si l'on n'est pas d'accord.
Quand on est absorbé par ce qu'on lit, les gens, le monde autour, n'a pas la même substance. Vous n'entendrez pas vraiment le gars qui demande des sous ou un ticket restaurant, vous ne verrez que du coin de l'esprit la bande de jeunes en train de débattre sur les plus belles chaussures du groupe, vous ne vous apercevrez pas vraiment que la vieille en face de vous s'est levée et a été remplacée par un homme (ou une femme!) que vous auriez trouvé(e) tout à fait à votre goût autrement! Vous ne suivrez plus non plus le défilement des stations et il vous sera arrivé quelque fois de rater votre arrêt. Si vous arrivez à lever la tête assez régulièrement pour suivre l'avancement de votre trajet, c'est celui de votre livre qui vous tracassera: vous vous demanderez si vous arrivez à finir le chapitre ou le paragraphe avant de devoir descendre. Si vous avez encore du temps, vous envisagerez la possibilité de commencer le prochain chapitre, sachant, avec angoisse, que vous n'aurez pas le temps, non, alors on "pressera" la lecture, on engloutira avec encore plus d'avidité les mots, les phrases, les lignes... Mais l'arrêt maudit finira bien par arriver, et toujours trop tôt. Comment on n'arrivera pas à finir avant d'avoir à descendre, on lira en marchant vers la sortie (on se fera bousculer, et les gens râleront... mais cette fois on ne s'en apercevra pas).
Le monde se trouve là, entre la première de couverture, qui le présente, et la quatrième de couverture, qui le résume. Le monde se limite à cela, et ça simplifie tellement tout!
Quand on n'a rien à lire, ou qu'on n'a pas vraiment envie de lire (si, ça arrive, avouez! Moi, j'avoue), on s'amuse alors à regarder ce que les autres lisent. On devient étonnement content lorsqu'on a déjà lu celui-là qu'une personne lit. Quand c'est possible, on ira même lire par dessus l'épaule de cette sympathique personne (si elle lit la même chose que nous, elle est forcément sympathique) pour savoir où elle en est rendue, et on se racontera la suite de l'histoire, fier d'avoir ce pouvoir de narrateur omniscient, qui sait tout ce qu'il va se passer.
D'autre fois, on reconnaîtra un titre qu'on n'a pas encore lu. Piqué de curiosité, on lira par dessus l'épaule de notre voisin pour en attraper des bribes et décider si on le range définitivement dans la catégorie "à lire" ou si on l'oublie.
Lire dans les transports, c'est aussi faire preuve d'un égocentrisme crasse en matière d'humanité et de citoyenneté. Non, je ne lirai pas le journal, je ne saurai pas ce qu'il est advenu de terrible à tel endroit de la planète. Non, je ne veux pas connaître mon soit disant horoscope ou la météo de demain. Oui, je survivrai sans connaître le programme de télé de ce soir. Oui, même les pièces qui se jouent au théâtre, je veux bien les méconnaître.
Mon monde se trouve entre 4 pages cartonnées, et le reste n'importe pas tant que je serai dans ce monde.

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