jeudi 18 mars 2010

Compagnon

Il me regarde depuis plusieurs semaines du coin de ma chambre, dans l'ombre, là bas. À l'endroit où le toit rejoint les murs. Je l'y ai lancé. Non pas que je le voulais loin de moi, au contraire! Mais il fallait que nous soyons suffisamment séparés pour que je puisse l'oublier un peu. Pour que je puisse me concentrer sur ce que j'ai à faire. Pourtant, mon dos ne rêve que de sentir son poids. Mes épaules aspirent à sentir les courbatures naître de le transporter. Mes pieds veulent sentir cette masse les enfoncer dans la terre. Mes jambes veulent sentir l'effort de le soutenir.
Car je le veux bien rempli, bien lourd.
Alors, pour qu'il ne soit pas trop fâché quand j'aurai besoin de lui, je lui fais les yeux doux certains soirs. Parfois, je le porte presque vide, juste pour le sentir, comme pour une répétition à demi costumée, lorsqu'un comédien ne met que les accessoires importants de son habit.
Je lui raconte les endroits où je l'amènerai s'il m'est fidèle, s'il tient le coup. Il sait que je ne serai pas tendre avec lui, mais il sait que je l'ai choisi pour cela, parce qu'il est résistant. Il est prêt à vivre l'imprévu, à affronter l'inconnu.
Et comme mon sac, je veux que mes souvenirs pèsent plus tard.
Parce que l'aventure, ça se transporte.
Parce que la liberté a un poids malgré tout ce qu'on croit.

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